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  • Vincent Peillon accusé de devoir 20.000 euros au PS

    in "Le Figaro" - Arthur Berdah Publié

     

    Épinglé pour n'avoir pas payé sa quote-part d'eurodéputé ni sa cotisation depuis plus de trois ans, le candidat à la primaire à gauche pourrait être disqualifié d'office s'il ne rembourse pas ses dettes avant le 15 décembre.

    Sitôt sa candidature annoncée, sitôt viennent les premiers obstacles. Vincent Peillon, qui a surpris tout le monde en se lançant dans la primaire à gauche après plus de deux ans de retrait, pourrait finalement être empêché de concourir. En cause, le fait qu'il n'aurait, selon Le Canard enchaîné, pas payé sa quote-part d'eurodéputé ni sa cotisation au Parti socialiste depuis plus de trois ans. Soit une dette d'environ 20.000 euros... qui entraîne sa démission automatique du parti.

    Interrogé mardi soir en marge d'une réunion de ses soutiens à la Gaîté lyrique (IIIe), l'ancien ministre de l'Éducation nationale n'a pas démenti l'information. Au contraire, il a même promis de rectifier le tir au plus vite. «Il y a plus de 20 ans que je suis au PS. S'il y a des cotisations à mettre à jour, je les mettrai à jour avant le vote - et le dépôt des candidatures c'est jeudi -, je le ferai avec plaisir. (...) Cette question va être réglée, vous allez voir, dans les 24 heures», a-t-il assuré à LCI.

    Toutefois, il a laissé entendre que cette fuite pourrait avoir été téléguidée par ses adversaires pour le disqualifier. «Je veux un beau débat d'idées, pas un échange de boules-puantes. Donc si certains sont un peu nerveux... (...) Vraiment j'appelle chacun - je le fais depuis un moment - à faire un débat d'idées, et j'aimerais qu'on fasse attention, surtout qu'on est devant les Français, à pas faire ce genre de choses. C'est pas exactement au niveau d'une présidentielle», a-t-il jugé.

    Assurant qu'il n'y avait selon lui «aucune difficulté», il a finalement ajouté: «Je veux vraiment dire à chacun “faites attention”, parce que ça juge plutôt ceux qui emploient ce genre d'arguments. On va avoir un beau débat d'idées, je suis au Parti socialiste depuis plus de 20 ans, j'en ai été un dirigeant pendant 20 ans, j'ai été... Bon, voilà, donc, euh... Vraiment, je souhaite qu'on passe à autre chose. (...) Mais c'est déjà un petit peu dommage d'avoir fait ça», a-t-il enfin glissé.

    Selon RTL, Vincent Peillon suspecterait l'entourage de Manuel Valls d'être à l'origine de ces révélations après que l'une de ses soutiens, la secrétaire d'État aux Personnes âgées Pascale Boistard, aurait elle-même évoqué cette ardoise en Conseil des ministres. Pourtant, interrogée en marge de la réunion des soutiens de Manuel Valls qui se tenait mardi soir à la Maison de la Chimie (VIIIe), celle-ci a botté en touche: «Ah ben ça, faut interroger le premier fédéral de la Somme».

  • Comment Hollande a tué la recherche

    François Hollande avait-il promis, en 2012, d’améliorer le financement de la recherche publique et des universités ? Oui. Dans son discours du Biopole de Nancy, le 5 mars 2012 (que j’avais publié dans son intégralité sur le blog {Sciences²}  alors tenu sur le site Web de Libération. Un discours annoncé à tous les acteurs de la recherche et de l’université par Vincent Peillon comme celui qui allait exposer clairement les ambitions et le programme de François Hollande dans ce domaine. Il y fustigeait la politique de Nicolas Sarkozy : «En dix ans, en intensité de recherche nous sommes passés de la 4e à la 15e place des pays de l’OCDE. Pour un pays qui ne cesse de parler d’excellence, ce n’est pas concluant ! La recherche publique civile, contrairement à ce qui peut se dire, est en forte baisse : les organismes de recherche, l’Agence nationale de la recherche elle-même voient leurs crédits baisser dans des proportions importantes. Pour cette année, 12 % de baisse pour le CNRS et 15 % de baisse pour l’ANR. » Et d’annoncer une politique à l’opposé.

    L’a t-il fait ? Non. Qui le dit ? Bercy, bien sûr, avec ses chiffres. Les opposants de gauche à sa politique. OK. Quelques journalistes. Certains font leur travail. Mais si vous avez un doute sur ces appréciations en raison de leurs origines, faites simple. Il suffit de vous tourner vers les partisans de la politique de François Hollande, dès lors qu’ils se trouvent en situation d’avouer une vérité qui ne leur plait pas.

    Le cri du cœur du sénateur

    Le cri du cœur provient donc d’un sénateur, fidèle soutien du président, Michel Berson. Sénateur de l’Essonne. Impliqué dans les travaux parlementaires sur le budget de la recherche. Connaisseur du sujet en raison son implantation à Orsay et Saclay où se trouvent l’université Paris-Sud, le CEA, de multiples grandes écoles d’ingénieurs, le synchrotron national Soleil, etc. Membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Michel Berson participait donc à sa longue audition sur la stratégie nationale de la recherche, tenue jeudi 8 décembre, salle Lamartine à l’Assemblée Nationale. J’ai déjà fait référence à cette audition dans une note précédente soulignant l’hypocrisie des propos du secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur et à la recherche, Thierry Mandon au sujet des personnels et en particulier des jeunes précaires virés des laboratoires en masse depuis cinq ans.

    de réunion, les langues se délient un peu. Après qu’un participant, un peu horrifié de ce qu’il disait demande à la cantonade « il n’y a pas de journalistes au moins ? », Michel Berson fit cette proposition formidable. « L’Allemagne est à 3 % de son PIB pour la recherche, la France se traîne toujours à 2,3 % depuis 2000 dont 0,8 % pour la recherche publique. Pour rattraper l’Allemagne, avec une recherche publique à 1 % du PIB, il faut une loi pluriannuelle de programmation d’une augmentation de 1 milliard chaque année de notre budget consacré à la recherche publique durant cinq ans. »

    Assis derrière moi, un physicien dont je tairai le nom, qui occupa un poste important au synchrotron national Soleil, ne tint plus. Et explosa de colère : « Mais pourquoi ne pas l’avoir fait depuis cinq ans, avec la gauche majoritaire à l’Assemblée et le proposer maintenant alors qu’elle pourrait bien ne plus l’être en 2017 ! » Curieusement, cette proposition recoupe d’assez près une revendication portée depuis le début du quinquennat par diverses organisations syndicales  (SNCS-FSU, Snesup-FSU, SNTRS-CGT) et par des mouvements comme Sciences en marche, Sauvons la recherche ou Sauvons l’université.

    Le cri du cœur du directeur général de Paris-Saclay

    Michel Berson n’est pas le seul à manger le morceau, lors de cette réunion très peu suivie par la presse. En voici un autre, Claude Chappert, qui jouit de la confiance du gouvernement puisqu’il l’a récemment mis aux manettes de l’opération Paris-Saclay. Ce directeur général de la Fondation de coopération scientifique censée mettre en place le futur campus Paris-Saclay, rien moins que la plus grande concentration de chercheurs du pays, a toutefois un défaut pour le gouvernement.

    Claude Chappert, passé par l’activité de chercheur, titulaire d’une médaille d’argent du CNRS pour ses travaux en micro-électronique, ne sait pas s’en tenir à la langue de bois des hauts fonctionnaires (dé)formés à l’ENA. En fin de réunion, il a lui aussi son cri du cœur : «les taux de succès à l’ANR se sont écroulés… mais les crédits récurrents aussi !», pour indiquer à quel point les laboratoires sont en peine. Et pourtant, il parle du nec plus ultra de la recherche française, connectée aux enjeux industriels et l’emploi de demain. Le graphique ci-dessus montre l’écroulement des taux de succès des projets des chercheurs en réponse aux appels d’offre de  l’ANR. Il s’arrête en 2012, mais depuis la situation s’est encore dégradée. En 2014, le taux de succès de l’appel d’offres principal de l’ANR avait chuté à 8,5 % ! En 2015, malgré la diminution forte du nombre de projets proposés, tant le découragement fait rage dans les labos, le taux est resté inférieur à 10 %. Une catastrophe, entraînant une véritable crise dans le système de l’ANR, avec démissions en cascade de chercheurs membres des comités d’évaluation, ulcérés de se voir mêlé à une sorte de « mascarade », une « loterie » dénuée de valeur scientifique.

    Sciences en marche livrait en 2014 ce petit calcul pour le seul CNRS afin de quantifier la perte des moyens des laboratoires sur la durée. En 2004, la dotation aux laboratoires était de 194 M€ en euros constants valeur 2013 contre 145,2 M€ en 2014. Cette perte de 26 % est une estimation minimale, car entre les deux dates, de nombreuses charges d’infrastructure (entretien des bâtiments, électricité, eau) ont été portées aux budgets des laboratoires, alors qu’elles étaient financées par ailleurs en 2004. Il est intéressant de comparer cette perte aux frais de gestion de l’ANR en 2015, près de 33 millions d’euros en 2014, alors que le travail de cette structure – la répartition des crédits – était auparavant réalisé par les organismes de recherche, les universités ou les services ministériels sans que cela coûte un sou de plus que leurs budgets normaux.

    Coupes budgétaires à répétition

    Geneviève Fioraso et Thierry Mandon ont longtemps cherché à masquer le reniement de François Hollande sur les budgets de la recherche et des universités. En annonçant chaque année des augmentations mirobolantes de crédits.  Sauf que la pratique consistant à voter des crédits en loi de finances initiale (LFI) puis à les sabrer en cours d’année a perduré. En témoigne l’analyse de l’exécution du budget 2014 dans un rapport parlementaire démontrant la disparition de près d’un milliard entre la LFI et la réalité budgétaire. Dans ce rapport (de Michel Berson et Philippe Adnot), il est précisé que la perte pour le budget strict de la recherche publique équivaut à 6 % de son total.

    Même pratique pour les postes d’universitaires annoncés en hausse chaque année. Mais ces créations de poste n’ont même pas suivi l’augmentation des effectifs étudiants. Quant aux postes annoncés, le tarif d’évaporation en cours d’année fait plus que doubler celui des crédits de recherche : le rapport Adnot-Berson estime que 15 % des postes annoncés par le ministère ne sont pas créés, car les universités, devenues autonomes au plan budgétaire, n’ont pas les crédits pour les salaires correspondants. Dans son discours de Nancy, François Hollande s’élevait contre cette pratique de Nicolas Sarkozy – ne pas compenser le transfert de charges du ministère aux universités – aboutissant à l’asphyxie financière des universités et « le gel de nombreux postes ». Un processus aggravé par la vaste réorganisation des universités (autonomie budgétaire, fusions, Comue, IDEX…) qui a donné lieu à la création de postes administratifs et d’équipes présidentielles dont le nombre et les salaires en augmentation très rapide et parfois très loin des standards universitaires ont grevé les budgets.

    Le bilan de François Hollande pour les moyens accordés à la recherche et aux universités est donc net. Non, il n’a pas tenu les promesses de 2012. Et le refus de l’admettre pèse sur la sincérité du débat politique pour les prochaines élections.

  • Comment la sénatrice Samia Ghali a fait régulariser sa piscine

    Le parquet national financier a ouvert une enquête préliminaire concernant la sénatrice PS de Marseille. Il s’intéresse notamment aux conditions d’achat de sa villa marseillaise. Parmi les étrangetés du dossier, une piscine construite illégalement et promise à la destruction, qui a miraculeusement été sauvée. La cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui avait ordonné sa démolition, se penche à nouveau sur ce dossier ce mardi. Enquête en partenariat avec Mediapart.

     

    Mardi 6 décembre, la cour d’appel d’Aix-en-Provence examine la requête de l’ex propriétaire d’une piscine construite illégalement dans un espace boisé classé sur les hauteurs bourgeoises du Roucas Blanc, à Marseille. Une affaire d’urbanisme classique si les nouveaux propriétaires n’étaient pas la sénatrice socialiste Samia Ghali et son époux.

     

    Le couple est visé par une enquête préliminaire du parquet national financier, comme l’a révélé le journaliste Xavier Monnier dans son livre Les Nouveaux parrains de Marseille. Celle-ci a été ouverte en mai 2016 pour détournements de fonds publics, corruption, favoritisme et blanchiment suite à la réception d’un courrier anonyme. Les enquêteurs de l’office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) saisis en septembre dernier s’intéressent notamment à la constitution en quelques années d’un patrimoine immobilier évalué à plus d’1,7 million d’euros par Samia Ghali, maire des 15e et 16e arrondissements, et de son époux Franck Dumontel, ex-directeur de cabinet à la région PACA puis à la communauté urbaine de Marseille.

     

    Dans leur viseur revient évidemment la villa du Roucas Blanc qu’ils ont acquise le 12 mars 2010 pour 1,3 million d’euros. Cet achat comporte quelques étrangetés dans son montage financier. Le vendeur, un garagiste marseillais, se montre très arrangeant avec les acheteurs. Il accepte sans sourciller un échange de maison avec le mari de Samia Ghali, propriétaire d’une villa évaluée à 400 000 euros à Carnoux-en-Provence, une commune de l’arrière-pays marseillais. Il consent aussi aux acquéreurs un prêt sans intérêts de 350 000 euros sur huit ans pour boucler la vente.

     

    DE GROSSES ASTREINTES

    Il faut dire que le retraité a sur le dos une décision de justice gênante qui peut le pousser à se séparer rapidement de son bien situé sur la colline qui fait face à Notre-Dame de la Garde. La piscine qu’il a fait construire à la fin des années 1990 a fait l’objet d’un arrêt de la cour d’appel ordonnant sa démolition le 15 novembre 2005. L’arrêt précise que la piscine « de 14,40 mètres de long par 10,10 mètres de large » a été réalisée « sans demande ni autorisation d’urbanisme » et est « entièrement implantée dans l’espace boisé classé ».  Il n’applique pas cette décision, malgré une astreinte de 75 euros par jour. Une première fois, en 2007, celle-ci est levée pour la somme de 10 575 euros. Trois ans plus tard, une nouvelle facture de près de 80 000 euros lui pend encore au nez. Sa piscine commence vraiment à lui coûter cher, mais c’est le prix de l’illégalité.

     

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    En vendant sa villa, il stoppe le compteur de l’astreinte. Dans l’acte notarié de cession au couple Dumontel-Ghali, le garagiste déclare qu’il n’est « pas en mesure de fournir de certificat de conformité de la construction vendue ». L’acte spécifie : « L’acquéreur, parfaitement informé de cette situation, déclare vouloir en faire son affaire personnelle sans recours contre quiconque. » En clair, Samia Ghali et son mari devront désormais appliquer le jugement de la cour d’appel sous peine de devoir à leur tour s’acquitter de l’astreinte.

     

    Ce sont les agents de la Ville de Marseille qui, au cours d’une inspection le 22 mars 2001, ont découvert l’ouvrage et constaté sur procès-verbal sa réalisation sans permis de construire comme son installation dans un espace boisé classé du plan local d’urbanisme. L’infraction est suffisamment caractérisée pour que l’affaire soit portée devant la justice et mène à l’arrêt de la cour d’appel. C’est encore la Ville qui décide de « liquider l’astreinte » (la solder) en 2007, faisant ainsi preuve de sa volonté de ne pas laisser le propriétaire de la villa enfreindre impunément le droit de l’urbanisme.

     

    L’ARRANGEMENT AVEC LA MAIRIE

    Mais à partir de la vente de 2010, la donne va radicalement changer. Les nouveaux propriétaires ne veulent ni détruire la charmante baignoire ni payer l’astreinte. « Comme beaucoup de gens, Samia Ghali est venue me voir avant la vente pour régulariser la situation, nous avait expliqué en décembre 2014 Claude Valette, ancien adjoint à l’urbanisme de Jean-Claude Gaudin (LR). Elle m’avait expliqué que détruire la piscine pourrait fragiliser la maison. Je lui avais alors dit qu’elle n’avait qu’à la remplir de terre et mettre des petites fleurs dessus. Elle a eu ce compromis. Après, elle l’a fait, elle l’a pas fait, personne n’est allé vérifier. » Recontacté, Claude Valette ne nous a pas rappelé, sa successeure, Laure-Agnès Caradec non plus.

     

    Alors que l’ancien propriétaire conteste encore certaines des astreintes qui lui incombent, le couple Ghali-Dumontel dépose, selon la préfecture des Bouches-du-Rhône qui supervise désormais les questions d’astreinte, un recours devant la cour d’appel mettant en avant le même argument. Il demande « la suspension de l’exécution de l’arrêt de la cour, au motif que la démolition des ouvrages pourrait entraîner des risques pour la sécurité des propriétés voisines et la bâtisse principale, en s’appuyant sur un rapport d’expert ».

     

    « JE NE POUVAIS PAS DÉMOLIR LA PISCINE », ARGUE GHALI

    Contactée, Samia Ghali argue d’une expertise qu’elle refuse de nous communiquer. « Je comptais démolir tout de suite quand j’ai acheté, mais nous avons fait une expertise et l’expert m’a dit que je ne pouvais pas démolir la piscine sans mettre en danger le versant de la colline, explique l’élue socialiste. J’ai écrit à la Cour d’appel d’Aix-en-Provence et à la mairie, moi je ne prends pas la responsabilité de faire tomber la maison et une colline. Ensuite on a fait une modification du PLU, comme pour tout le monde, j’ai demandé à ce qu’on me régularise. »

     

    Après le changement de propriétaire, la Ville de Marseille a en effet profité d’une révision du plan local d’urbanisme (PLU) en 2013 pour « régulariser » la piscine de la sénatrice. L’étroit terrain occupé par la piscine est sorti de l’espace boisé classé qui le rendait inconstructible. La communauté urbaine, dont Samia Ghali est alors vice-présidente à l’habitat, approuve cette révision du PLU le 28 juin 2013. Le couple peut alors sereinement déposer une déclaration préalable de travaux pour la construction d’une piscine, déjà existante. En ne s’y opposant pas, la mairie de Marseille régularise la piscine du couple Ghali-Dumontel au début de l’été 2014.

     

    À entendre Samia Ghali, ce type d’intervention serait courante à Marseille et aucune faveur ne lui a été accordée par la Ville. « C’est à ça que servent les révisions de PLU, ils le font pour plein de gens, se défend la sénatrice. En régularisations, ce qu’on a fait sur les 15e et 16e arrondissements, je peux vous en sortir des tonnes ! Je n’ai pas été plus avantagée que n’importe qui. » Samia Ghali argue que ses voisins du Roucas-Blanc auraient également obtenu une modification du PLU rendant constructible une de leurs parcelles.

     

    Quant au financement de sa villa, Samia Ghali ne voit rien d’étrange ni dans l’échange de propriétés, ni dans le prêt à taux zéro gracieusement accordé par le vendeur. Selon elle, l’ancien propriétaire voulait se rapprocher de Carnoux pour des raisons familiales et comme il est « joueur, ça l’arrangeait d’avoir tous les mois un revenu ». « On paie comptant (l’emprunt, ndlr), par prélèvement automatique », dit l’élue. L’ancien propriétaire, aujourd’hui retraité, que nous avons cherché à joindre, n’a pas donné suite.

     

     

     

    AU PARQUET NATIONAL FINANCIER, UNE ENQUÊTE PLUS LARGE

    Outre le patrimoine de l’élue et son époux, l’enquête préliminaire du PNF porte également sur plusieurs affaires déjà dévoilées dans la presse et qui n’avaient jusqu’ici eu aucune suite judiciaire. Les enquêteurs de l’OCLCIFF s’intéressent ainsi aux subventions versées par la région Provence-Alpes-Côte d’Azur à deux cousins de la sénatrice lorsque cette dernière était vice-présidente du conseil régional déléguée aux sports, à la jeunesse et à la vie associative de 2004 à 2010.

    Sur cette période? 960 000 euros ont été versés par la région à l’association Omnisport hermitage Campagne-Levêque présidée par son cousin Abdelhafid Bahou, alors propriétaire d’un magasin d’équipement sportif (depuis mis en liquidation). Rencontré en 2013, Abdelhafid Bahou avait reconnu y avoir fourni son club grâce aux subventions régionales mais “à prix coûtant”. Un autre cousin, Azzedine Bahou, avait lui reçu 82 000 euros dès l’année de création de son association Algérie innovation en 2007. Dans un rapport de 2013 sur la région Paca, la chambre régionale des comptes épinglait cette subvention inhabituelle pour une association à peine créée. Elle relevait notamment que « les factures justifiant la subvention d’investissement concernaient des travaux au domicile du président [une maison sur le technopôle de Château-Gombert, NDLR], où l’association a son siège ». Quant à la subvention de fonctionnement, le compte-rendu d’activité de l’association « ne rend compte d’aucune action spécifique ».

    Est également examiné un marché public de la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et du pays de l’Étoile remporté en décembre 2012 par son époux Franck Dumontel, reconverti dans le conseil après son départ de la communauté urbaine. Sa société de conseil aux collectivités territoriales avait été la seule à candidater sur ce marché. Quelques mois plus tard Daniel Fontaine, le maire d’Aubagne (PCF) et vice-président de la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Étoile d’alors, avait annoncé que la sénatrice s’apprêtait à puiser 20 000 euros dans sa réserve parlementaire pour la future pelouse synthétique du stade d’Aubagne.

    Samia Ghali et Franck Dumontel sont sortis indemnes des précédentes enquêtes judiciaires ayant visé le PS dans les Bouches-du-Rhône. Tout juste le nom de l’ex vice-présidente de la région Paca avait-il été mentionné au détour d’un interrogatoire dans le cadre de l’affaire de détournements de fonds de la région Paca qui a abouti à la condamnation de la députée Sylvie Andrieux. « Elle a son propre circuit », avait lâché Rolland Balalas, l’ancien assistant parlementaire de Sylvie Andrieux. Le juge d’instruction en charge du dossier en était resté là. Franck Dumontel avait lui été mis en examen dans le cadre cette affaire, en tant qu’ex directeur de cabinet de Michel Vauzelle, avant de bénéficier d’un non-lieu en mai 2012. En février 2011, l’ex directeur de cabinet du président de la communauté urbaine avait été entendu été en garde à vue dans le cadre d’une des affaires Guérini, sans aucune suite.

    Jean-Marie Leforestier (Marsactu) et Louise Fessard (Mediapart)

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